Avec 67 tableaux, une soixantaine de gravures et de nombreux dessins, Camille Pissarro (1830-1903) est l’artiste impressionniste qui a le plus représenté la ville de Rouen, dans laquelle il a séjourné à quatre reprises, entre 1883 et 1898. Grâce au programme de numérisation des collections du département des estampes menée par Gallica, il est maintenant possible d’admirer en ligne une partie des eaux-fortes et zincographies rouennaises de Pissarro.
En 1883, à la recherche de nouveaux motifs et sur le conseil de Durand-Ruel, Pissarro se rend pour la première fois à Rouen. Il va y séjourner deux mois (octobre-novembre), logeant dans l’hôtel d’un de ses amis, place de la République. Ce séjour marque un tournant important dans son style. S’il peint essentiellement les berges de la Seine, il ne se montre pas indifférent à la vieille ville, dont il dessine les rues pittoresques. D’après ses nombreux croquis et dessins, il réalise, dans les quatre années qui suivent, 22 gravures de la ville, de ses ruelles, de ses quais et de son port.
En 1896, il séjourne à nouveau deux mois dans la capitale normande. Malade, confronté à d’importants problèmes de vue, Pissarro est contraint de peindre depuis sa fenêtre, sans pouvoir planter son chevalet directement dans la rue. Il résultera de ce séjour une magnifique série de vues du port de Rouen. Comme lors de son premier séjour, Pissarro se balade dans la vieille ville, croque les ruelles étroites, et de retour à l’hôtel, réalise des zincographies. En tout, ce sont 35 nouvelles eaux-fortes et zincographies qui sont créées. C’est la dernière fois que Pissarro grave Rouen. Ses deux derniers séjours (fin 1896 et 1898) ne donneront lieu à aucune nouvelle estampe.
Les estampes réalisées à Rouen sont typiques de la production gravée de Pissarro : il s’agit, selon l’expression du peintre, « d’impressions gravées ». Camille Pissarro est, avec Edgar Degas, l’artiste impressionniste qui s’est le plus intéressé aux possibilités offertes par l’estampe. Entre 1863 et 1902, il a réalisé quelque 200 planches, dans des techniques très diverses et riches : eau-forte, aquatinte, pointe-sèche, xylographie, lithographie et monotype. Sa rencontre avec Degas, en 1878, a été primordiale dans sa pratique de la gravure : Degas et Pissarro partagent le même goût pour la « cuisine » et le beau tirage. Edgar Degas initie Pissarro a de nouvelles techniques, plus confidentielles, comme le monotype ou la manière grise.
Les estampes de Pissarro ont été très peu tirées de son vivant : l’artiste réalisait le plus souvent les tirages lui-même eu ou avec l’aide de son fils. La plupart des épreuves actuellement sur le marché ont été réalisées posthume par sa famille dans les premières décennies du XXe siècle. On reconnait ces tirages tardifs grâce au cachet spécifique qu’elles portent.
Voir d’autres gravures de Pissarro représentant Rouen sur Gallica et sur la base images de la BNF
Pour en savoir plus: catalogue de l’exposition Une ville pour l’impressionnisme : Monet, Pissarro et Gauguin à Rouen » présentée au musée des Beaux-arts de Rouen (4 juin – 26 sept. 2010), Flammarion, 2010. et Janine Bailly-Herzberg, Dictionnaire de l’estampe en France (1850-1914), Flammarion, 1992.
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