J’ai testé le guide de voyage sur liseuse électronique

Depuis ma récente acquisition d’une liseuse électronique, je multiplie mes expériences de lecture numérique. Une des dernières en date : un voyage à l’étranger avec la version Epub d’un célèbre guide touristique… Solution pratique ou mauvaise idée ?

Le Guide du Routard Amsterdam sur Liseuse Bookeen

Le guide papier, une offre dépassée ?

Il y a longtemps que je peste du manque de dynamisme de l’édition de guides touristiques, qui semble ignorer les potentiels que lui offre le web : on continue à produire des guides papier comme dans les années 1990 sans prendre en compte les avantages que pourrait offrir le livre augmenté et autres innovations récentes (ou alors, je suis passée à côté de l’offre).

J’aime bien feuilleter des guides papier pour préparer des voyages, pour rêver depuis mon canapé : j’en emprunte plusieurs à la bibliothèque, je les dépouille, liste sur le papier les lieux que j’aimerai visiter, prends des notes sur l’historique des villes que je vais visiter, etc. Pour ce travail préparatoire (que je n’ai jamais le temps de réaliser correctement), ma préférence va aux guides bleus et aux guides Gallimard, deux collections de grande qualité, mais aussi onéreuses qu’encombrantes, aussi il est rare que je les acquière et encore plus que je les emporte.

Ce que j’emmène plus volontiers dans mon sac de baroudeuse, ce sont les Guides du Routard, dont j’apprécie les bonnes adresses (quoique, ces dernières années je sois devenue de plus en plus critique à leur propos) et la légèreté. Il m’est arrivé de tester les Cartovilles, dont la formule qui met en avant les plans est assez pratique, mais dont le contenu, trop succinct, me laisse souvent sur ma faim.

Mon étagère « voyages » dans ma bibliothèque

Étant une adepte du tourisme itinérant (qu’il soit en train ou en vélo), je visite souvent plusieurs villes au cours d’un voyage. Ce qui n’est pas sans poser quelques soucis au moment de choisir mon compagnon papier de voyage. Si je visite trois villes et que ces trois villes ont fait l’objet de trois guides du routard différents, il faut tous les embarquer, ce qui n’est pas des plus évident. Pire encore : devoir emporter un ouvrage de 350 pages alors que seules dix d’entre elles concernent ma destination. À ce rythme, j’ai vite pris mon parti de découper sauvagement les feuillets de mes Routards pour n’emporter que les pages qui m’intéressaient.

Cette extrémité m’a amenée à me questionner sur les pratiques des maisons éditoriales qui semblaient ignorer les usages de leur public cible. À l’heure des bases de données, de l’XML-TEI, de la PAO et surtout du Print-on-demand, pourquoi n’avaient-ils pas imaginé un service de guide de voyage sur mesure, où, plutôt que d’acheter le guide Italie du Nord et le guide Italie du Sud pour seulement trois villes, on pourrait composer un menu personnalisé, en acquérant seulement les chapitres « Milan », « Sienne » et, par exemple, « Naples » ? Un bon flux de gestion des contenus, une mise en page par blocs permettrait de générer automatiquement un guide de voyage personnalisé et parfaitement lisible ! J’imagine que l’on pourrait aller beaucoup plus loin encore, notamment au chapitre des bonnes adresses : malgré mon désir de les tester, les adresses « de prix moyen à plus chic » et « très chic » du Guide du Routard ne m’ont jamais été utiles, fautes de finances suffisantes. Elles encombrent donc mes pages : avec un système de guide généré automatiquement et expédié en Print-on-Demand, il serait donc possible de les éliminer et de ne garder que l’utile en sélectionnant un profit de voyageur « baroudeur », « tout confort », « grand luxe ».

Voilà ce qui pour moi représenterait l’avenir du guide touristique papier… Mais à l’heure d’internet, des smartphones, des applications mobiles, des QR codes, existe-t-il encore un avenir pour le guide papier ? Voilà ce que m’opposaient des amis à qui j’exposais mon idée révolutionnaire.

Le mobile, ou la fin du guide papier ?

Pourquoi encore s’encombrer d’un guide papier quand les offices du tourisme proposent des sites responsive et qu’on trouve un bon restaurant sans difficulté avec Tripadvisor tandis que le logement se réserve en trois clics sur AirBnB ? Eh bien parce que le guide papier présente encore cet avantage incomparable de la présélection et de l’éditorialisation (quoique sur ce plan, ma confiance est mise à mal depuis quelques années).

Sur le plan pratique, force est de constater que tout le monde n’est pas correctement équipé pour voyager avec comme seul guide les applications mobiles. Il n’y a encore pas si longtemps, la Data en mobilité à l’étranger était fort onéreuse. Par ailleurs, seuls les mobiles haut de gamme proposent une batterie suffisante pour tenir à cet usage intensif une journée entière (j’en ai déjà fait les frais à plus d’une occasion). Et quand bien même le mobile pourrait remplir cette fonction, le touriste peut être réticent à le sortir à tout bout de champ, soit parce qu’il craint d’être victime des pickpockets, soit parce qu’il veut profiter des vacances pour décrocher de son addiction aux écrans.

Comment j’ai testé le guide touristique sur liseuse électronique

Voilà où en étaient mes réflexions lorsque nous avons programmé notre voyage aux Pays-Bas. Venant tout juste d’acheter ma liseuse électronique, je me suis dit que l’occasion était trop belle et qu’il fallait que je teste le guide touristique en format EPUB. J’hésitais entre différents titres (Guides Bleus, GéoGuide, Routard), mais peu nombreux étaient finalement ceux proposés en version numérique. J’ai donc porté mon choix sur le Routard Amsterdam 2017, choix d’autant plus intéressant que je possédais une vieille édition papier du même titre, datant de mon premier voyage en cette ville (2014). J’allais donc pouvoir comparer les deux versions !

Par mesure de précaution, supposant que la consultation des plans pouvait être fastidieuse dans la version électronique, j’ai découpé les différentes cartes de la version imprimée, que j’ai glissées dans mon portefeuille. Nous étions parés !

 

La liseuse, un outil tout terrain 😉

… Et je n’ai pas regretté mon choix de substituer à mon guide touristique papier une version sur liseuse électronique. Je radote mais l’encombrement est proche de zéro : ma liseuse se glisse dans un sac à main, et je ne crains pas d’abimer la couverture (quoique je ne sois par ailleurs pas très maniaque sur ce point).
Rapidement, j’y ai trouvé un autre intérêt : je peux ouvrir mon guide dans n’importe quelles conditions (ou presque). Sous une pluie, j’aurais redouté que des gouttes d’eau flétrissent les pages de mon livre. Là, tant que la pluie reste fine, je ne crains pas pour ma liseuse ! De nuit, la liseuse s’avère à nouveau la plus pratique : pas besoin d’éclairer les pages à l’aide du téléphone portable, le rétroéclairage est intégré.

Mais surtout, l’avantage de la liseuse est qu’on n’a pas à chercher sa page : en rallumant la machine, on retrouve le livre ouvert à l’endroit où on l’avait laissé ! Je crois d’ailleurs que c’est ce que j’ai le plus apprécié de mon expérience du guide de voyage sur liseuse électronique : ne pas avoir sans cesse à chercher les pages.

Le Routard numérique, une véritable adaptation du contenu au support ?

Si je vous ai convaincu des avantages du guide de voyage sur liseuse, reste encore à évaluer la qualité de la navigation, le soin apporté par l’éditeur à la conversion d’un contenu pensé pour le papier à un format numérique. Dans le précédent billet, j’insistais sur ce travail éditorial – qui semble malheureusement trop souvent négligé : s’assurer, avec le même sérieux que pour une édition imprimée, qu’il n’y a pas de coquille, que la circulation au sein du texte est aisée.

Là dessus, disons le d’emblée, bien qu’un soin ait été porté à la maquette, Le Routard a encore des progrès à faire. J’ai apprécié de retrouver quelques codes graphiques des éditions papier (jeux de police, encadrés rouges, ici en gris…), ce qui ne m’a pas dépaysée. En revanche, j’ai regretté que tout le potentiel du numérique n’ait pas été exploité, notamment les liens hypertextes qui auraient pu faciliter la navigation. Quand, dans la partie « Hommes, Culture, Environnement », il est question des tableaux de Vermeer exposés au Mauritshuis et au Rijksmuseum, pourquoi ne pas insérer un lien hypertexte menant directement aux pages concernant ces deux établissements (et vice-versa) ?

Dans la version numérique du guide du routard, l’identité graphique des éditions papiers a été conservée

Lors de nos deux premières étapes, à La Haye et Haarlem, ce manque ne m’a pas sauté aux yeux : les contenus concernant ces deux villes sont assez courts et tiennent – dans la version papier – sur quelques pages à peine. Aucune difficulté pour passer des choses « à voir » à la partie « où manger » quelques clics suffisaient.
En revanche, une fois arrivés à Amsterdam, les choses sont devenues plus fastidieuses tant les contenus « à voir, à faire » étaient nombreux ! Il s’agit là d’un problème de structuration de la table des matières : si la partie « où manger » est bien recoupée en quartiers, facilitant ainsi la navigation, la partie « à voir à faire » n’a pas été correctement scindée en morceaux géographiques cohérents (c’est pourtant le cas dans le texte, mais cela n’apparaît pas dans le sommaire) : près de 80 pages (et les plus importantes !) à explorer à l’aveugle. J’ai un temps tenté de m’y retrouver avec la recherche plein texte (peu satisfaisante à mes yeux, mais il semble que ce soit propre à ma liseuse et non à l’ouvrage ici commenté) avant d’opter pour un système de signets. J’ai surligné virtuellement les entrées qui m’intéressaient pour y accéder plus rapidement, doublant donc la table des matières d’un ensemble de marques pages personnalisés.

Il me semble toucher là un problème que je devine récurrent avec le livre numérique : les éditeurs ne testent pas assez l’expérience de lecture qu’ils proposent. Ainsi, quelle est la pertinence d’un index quand on pourrait y préférer la navigation interne par lien hypertexte ou – simplement – s’appuyer sur la recherche plein texte ? Pourquoi maintenir les mentions « plan détachable » ou « voir plus loin rubrique machin » qui n’ont aucun sens dans un EPUB ? Certes, un lien hypertexte a été inséré au niveau des mots « plan détachable » (et mène effectivement à la carte d’ensemble), ce qui n’est pas le cas pour les renvois de pages.

Mais puisqu’il est question des cartes, parlons-en ! Vous souvenez-vous que je vous confessais, en début d’article, avoir détaché d’une édition papier antérieure les cartes d’Amsterdam afin de les emporter en sus de l’édition numérique ? Grand bien m’en a pris car – et c’est le plus gros reproche que je ferai à mon Routard dématérialisé, celles de la version numérique étaient illisibles, car trop petites. Il est vrai que je ne sais pas s’il s’agit là d’un défaut de conception de l’EPUB ou bien un reproche qu’il faut faire à ma liseuse Bookeen : après deux mois d’utilisation, je n’ai toujours pas trouvé comment zoomer sur les images incluses dans mes livres… Un vrai problème pour moi qui ai justement choisi une liseuse avec un écran haute résolution pour profiter pleinement des illustrations !

La carte papier (Routard 2014) vs la carte numérique (Routard 2017)

Évidemment, pouvoir naviguer dans la carte résoudrait mon souci, mais je dois avouer que j’imagine une solution plus pratique encore : que le Routard propose une version EPUB de ses guides… accompagnée de cartes papier ! Impossible ? Il suffirait soit de fournir des fichiers à imprimer, soit de vendre des pochettes « physiques » en librairie, contenant les précieux plans et un code pour télécharger le fichier numérique du livre. Une façon de relocaliser physiquement le livre numérique dans les librairies traditionnelles !

Et vous, à l’heure du numérique, quelle est votre expérience du guide touristique ?

Edit : en préparant ce billet, je suis tombée sur un article du blog « Voyager en Photo » qui m’a semblé très intéressant : il s’intitule « comment bien choisir son guide de voyage » et intéressera certainement les lecteurs de ce blog. 

4 réflexions sur “ J’ai testé le guide de voyage sur liseuse électronique ”

  • 9 mars 2018 à 21 h 32 min
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    Une ville, un village, se parcourt à pedibus. On peut cerner très vaguement l’ambiance d’une métropole, le seul guide valable ce sont les pas qui s’y promènent. Visiter Berlin, Prague ou New York en une semaine, le guide du Routard dans la main n’a pas de sens, concrètement. Se laisser aller (sans GPS) dans les rues et les quartiers avec de bonnes chaussures et tous les petits plaisirs s’offrent à la découverte. C’est mon point de vue(s)!

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    • 11 mars 2018 à 22 h 24 min
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      L’un n’empêche pas l’autre : j’aime beaucoup me promener, me perdre… Et j’apprécie le guide touristique culturel qui répond à mes curiosités, découvertes. Je ne cherche pas dans le guide « quoi voir » mais un outil pour faciliter mon séjour.
      Nous utilisons surtout le guide pour le choix des hébergements, des restaurants (ayant un petit budget, nous ne voulons pas regretter nos choix). J’apprécie aussi d’avoir des infos pratiques sur les lieux de visites (nombre de salles, prix d’entrée, horaires).

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  • 10 mars 2018 à 10 h 59 min
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    Je fais partie des fans de guides de voyage (une librairie de Marseille ne vend presque que ça, c’est fabuleux d’y aller) et des plans et des cartes. Et en voyage, je n’ai aucune envie de sortir un écran. D’ailleurs je préfère le papier parce qu’on peut le martyriser sans que ce ne soit grave (ma liseuse ne vaut pas une fortune mais quand même). Et donc, oui, j’arrache les pages des guides de voyage pour faire des économies de place…

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    • 11 mars 2018 à 22 h 40 min
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      J’adore ce genre de boutiques, qui donne tant envie de voyager ! Il y en a une belle de ce type dans le quartier Richelieu à Paris… Malheureusement, il manque parfois d’un peu de diversité dans l’édition…
      Nous sommes donc deux à découper nos guides papiers ;p

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