De retour de vacances, je profite du calme parisien pour trier mes photos et vous livrer le récit d’un rail trip de dix jours sur la côte orientale de l’Espagne. Après trois grosses journées à Valence, je fais une escale de dix heures dans Tarragone, la plus romaine des villes de Catalogne !

Après ces quatre intenses journées à déambuler sans relâche dans les rues de Valence, il me fallait un peu de repos. Escale à Salou, donc, où mes amis m’ont accueillie à bras ouverts : trois bonnes nuits de sommeil, quelques brasses dans la mer plus tard, me voici en forme pour continuer mon exploration, entièrement centrée sur la Catalogne désormais.
Une cité romaine
Attirée par la réputation romaine de Tarragone – et son classement au patrimoine mondial de l’UNESCO, je programme une journée de visite dans la cité. La vieille ville est construite sur les ruines de la cité romaine, et des vestiges archéologiques se dévoilent à chaque coin de rue.
Tarraco a été fondée en 218 avant J.-C. : pour les Romains, la ville est une base stratégique face à Carthage. La péninsule ibérique conquise, la ville devient la capitale d’une vaste province, l’Hispanie Citérieure. D’où ces vestiges imposants, reflets du prestige et du rang de Tarragone dans l’Empire Romain !
Le circuit touristique comprend un arrêt dans l’ancien forum (dont il ne demeure, il faut bien l’avouer, plus grand-chose), l’amphithéâtre romain et le cirque. Joli site que celui de l’amphithéâtre, avec vue sur la mer.

Comme dans beaucoup de monuments de ce type, les gradins ont largement été reconstruits au XXe siècle. Le plus intéressant est sans doute qu’on lit bien, sur ce site, les différentes strates d’occupation : à l’emplacement de l’arène subsistent des élévations de murs, dont le plan dessine une croix. Il y a longtemps eu, au milieu des ruines de l’amphithéâtre, une église. Surprenant ? Pas tant que ça ! Il s’agit d’un lieu de martyre : le premier évêque de Tarragone, saint Fructueux aurait été brûlé vif dans la fosse de cet amphithéâtre, en 259. Aussi, au Vie siècle, les wisigoths ont élevé une basilique en commémoration de ce supplice, remplacé au XIIe siècle par une église romane.
À y regarder de plus près, toute la vieille Tarragone est construite sur des monuments romains. La tour du Prétoire, non loin, existait déjà à l’époque romaine : elle bordait le forum provincial. Reconstruite, transformée, elle sert successivement de palais royal (au Moyen-Age), puis de caserne (à l’époque moderne) et enfin de prison (au XIXe siècle).

Mais ma plus surprenante découverte fut dans les sous-sols de la ville : de longues galeries souterraines… qui supportaient autre fois les gradins du grand cirque romain de Domitien ! Le tracé de la piste où couraient autrefois les chars se lit encore dans l’urbanisme, car la voirie a conservé son dessin. La plus belle place de la ville, où se dresse la mairie, est exactement à l’emplacement de la spina (le mur central du cirque, autour duquel tournent les chars)… Et, en regardant plus attentivement les maisons des rues adjacentes, il apparaît rapidement qu’elles sont toutes à cheval sur les anciens gradins, dont la galerie leur a servi de caves, puis de dépotoirs.
Un dispositif numérique permet de mieux appréhender l’aspect ancien du cirque et son occupation urbaine postérieure. On y découvre aussi des reconstitutions de la cité romaine et de ses imposants édifices officiels, aujourd’hui enseveli sous la cité médiévale.

Une visite de la cathédrale de Tarragone.
Les rues sont étroites, escarpées, et, évidemment charmantes. Il faut grimper jusqu’à la cathédrale, perchée au sommet d’une volée d’escaliers. Deux siècles ont été nécessaires pour la bâtir, à l’emplacement même de l’ancien temple romain de Jupiter.

De la cathédrale, j’ai surtout retenu un beau devant d’autel sculpté, datant de la période romane, où un détail m’a interpellée : on voit une sainte, nue, mangée par des serpents et des crapauds. Dommage que j’ai oublié de prendre le cartel en photo, il m’aurait peut-être éclairée sur cette iconographie.
Juste derrière, un magnifique retable gothique, avec ses pinacles dorés.
Dans la nef, le grand orgue était en restauration, aussi n’ai-je pas pu l’admirer. En revanche, je n’ai pas manqué de remarquer la présence de peintures murales, d’époque gothique, figurant des saints et des saintes.
Un petit musée rassemblait divers panneaux peints, quelques sculptures, à l’arrière de l’abside.

Mais le clou de la visite a été, à mes yeux, le beau cloître de la fin du XIIe siècle, achevé au début du XIIIe siècle. Comme j’apprécie la quiétude de ces lieux, le contraste entre les galeries fraîches et ombragées et le jardin baigné de lumière…

Musées et portes closes
Après avoir crapahuté dans les ruines, visité la cathédrale et déjeuné légèrement (il fait si chaud !), je m’enquiers de découvrir les musées – une mosaïque antique figurant toute une collection de poissons et de crustacés m’a tapé dans l’oeil alors que je préparais mes visites. Je tourne, j’erre… Impossible de trouver ce satané musée des antiquités ! À moins que… Oui, c’est bien ce grand bâtiment devant lequel je suis passée plusieurs fois déjà et où il ne semble y avoir âme qui vive… Et pour cause, il est en rénovation ! Une discrète affichette indique que les chefs-d’oeuvre sont exposés temporairement au musée du port… Dommage qu’on ne me l’ai pas dit à l’office de tourisme ! Une petite vingtaine de minutes plus tard, me voici au frais dans un ancien entrepôt où, effectivement, j’admire des vestiges romains, qui laissent deviner, par touches, la richesse passée de la ville… Mais de grandes mosaïques chargées de poulpes, poissons et crustacés, point ! Visiblement, le chef-d’oeuvre du musée, trop imposant, ne rentrait pas dans l’accrochage temporaire. Il faudra revenir !
Avant de reprendre le bus, il me reste un musée à découvrir : celui qui occupe le site de l’ancienne nécropole paléochrétienne, où je devine que je pourrais admirer de beaux sarcophages (j’adore les sarcophages paléochrétiens !). Mais, visiblement, ce jour-là, je ne suis pas en veine : les horaires indiqués par l’office du tourisme ne sont pas les bons, et le musée est fermé. On verra lors d’un prochain séjour, donc.

Aucun conseils pratiques pour accompagner ce billet, étant donné que je n’ai pas dormi à Tarragone et que mon repas a été assez insignifiant. Je vous laisse donc avec une galerie de photos de la cité…
Les photographies sont très belles et très pertinentes.
Toujours un plaisir à suivre.
Pour la femme aux crapauds et serpents de l’autel, j’ai vaguement souvenir d’avoir entendu parler de tels motifs du côté de Moissac par exemple mais plutôt avec l’idée qu’elle se faisait téter ou lécher les parties intimes donnant comme interprétation une représentation de la Luxure ou du Mal… voire des histoire de survivances de mythologie païenne. Bref rien de bien précis désolé et là je n’arrive pas à retrouver de sources en ligne donc à prendre avec de grosses pincettes.