La galerie Itinerrance, à deux pas de la BnF Mitterrand et des Frigos, présente jusqu’au 13 avril les œuvres de Borondo. Jeune madrilène fraîchement apparu dans la sphère du Street Art, Borondo, encore méconnu des parisiens, bien qu’il ait réalisé deux fresques à Vitry, ne manquera pas de séduire.

Son âge surprend. A 23 ans, Borondo affiche déjà des créations d’une étonnante maturité. Prolixe au cours de l’année écoulée, ses œuvres ont notamment été remarquées à Rome, où le jeune homme a séjourné plusieurs mois dans le cadre d’un échange Erasmus entre Universidad Complutense de Madrid et l’Accademia di Belle Arti di Roma[1].
L’admiration que suscitent ses œuvres tient beaucoup de leur monumentalité. Vous vous souvenez peut-être de cet immense personnage peint sur la façade d’un vieil immeuble à Torún en Pologne, sélectionné à plusieurs reprises dans les diaporamas “le meilleur du street art 2012” présentés par Rue 89 et Street Art Utopia.

Ce qui fait selon moi, la véritable originalité de Borondo c’est la technique très particulière qu’il emploie pour un autre type d’interventions, celles qu’il réalise sur les surfaces vitrées. Qu’il choisisse sur une vitrine, une fenêtre, une publicité lumineuse ou une cabine téléphonique, Borondo procède toujours ainsi : il enduit d’abord la surface de blanc d’espagne, cette peinture que l’on utilise pour obstruer les vitrines lors de travaux. Une fois cette couche sèche, il retire à l’aide d’une spatule de métal, de peignes et de pointes la peinture, faisant apparaître une image. Cette démarche a souvent été rapprochée de celle du portugais Vhils et du brésilien Ossario, qui eux aussi procèdent par retrait de matière pour créer leurs œuvres. Pour moi, plus encore, la technique de Borondo évoque la gravure : il raye la peinture comme on inciserait le vernis d’une plaque de métal. L’interrogeant à ce sujet, Borondo m’a répondu que cette esthétique l’avait effectivement marqué, bien qu’il ne pratique pas lui-même l’eau-forte ou la pointe sèche, techniques minutieuses qui nécessitent selon lui beaucoup de patience !
Dans la rue, Borondo aime intervenir sur des supports portant les stigmates du vécu. Un vieux mur, une fenêtre, du mobilier urbain désaffecté… autant de surfaces ayant une histoire. Il œuvre également parfois sur les publicités lumineuses, exploitant tout le potentiel d’un rétro éclairage. Interrogé par Jessica Stewart, il expliquait il y a quelques mois avoir adopté cette technique de peinture sur verre car elle se nettoye facilement.

L’humain est au cœur du travail de Borondo : sur les façades ce sont de gigantesques corps qui se déploient tandis que sur les fenêtres se révèlent parfois d’intimes portraits. On sent ici bien évidement une dette envers le modèle d’Ernest Pignon Ernest à qui Borondo a d’ailleurs rendu hommage en réalisant certaines de ses peintures directement sur des cabines téléphoniques, comme son aîné l’avait fait avant lui.

Le travail qu’il présente en galerie est dans la stricte continuité de ses interventions urbaines. Ici, vous ne verrez aucune œuvre sur toile. Les supports autonomes sur lesquels il crée pour le marché de l’art sont les mêmes que ceux sur lesquels il peint dans la rue : fenêtre aux montants décrépis, planches glanées ici et là, vieilles portes à la peinture qui écaille… Autant de matériaux qu’il rapporte de ses virées urbaines et dont les stigmates inspirent en partie son acte créateur.
A la galerie Itinerrance, rue Goscinny, on admire une dizaine de grands portraits sur des assemblages de planches disparates, autant de peintures sur de vieilles fenêtres aux montants de bois et un immense personnage peint à même le mur de la galerie. Attention cependant, dès l’inauguration de ce qui semble être sa première exposition personnelle en France, beaucoup d’œuvres étaient déjà vendues. Mais surement Borondo nous fera-t-il le cadeau de laisser de son séjour parisien quelques œuvres de rue ?
Toutes les infos pratiques sur la galerie Itinerrance.

Son blog et la page facebook de ses fans (non gérée par Borondo). Une vidéo
[1] Ses œuvres ont été signalées à Pigneto, San Lorenzo et Prenestina.
Magnifique. Merci de me faire découvrir ce jeune artiste.
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