1907, Quand Atget photographiait Rouen

1907, Quand Atget photographiait Rouen

Saviez-vous que le célèbre photographe parisien Eugène Atget avait aussi immortalisé Rouen ? Au milieu de la décennie 1900, il se rend dans la capitale Normande, où il réalise une cinquantaine de clichés : vieilles maisons à pans de bois, rues pittoresques, élégants hôtels particuliers. Ses images, numérisées par la Bibliothèque municipale et disponibles sur Gallica, nous entraînent dans un Rouen méconnu, et, bien souvent, disparu.

Eugène Atget, Maisons: 28-30, rue du Bac et rue Saint-Patrice., 1907, Bibliothèque municipale de Rouen, Est. rec. m 171-11.

D’Eugène Atget, je vous ai déjà à plusieurs reprises parlé sur ce blog : pour dresser son portrait et les contours de son œuvre, dans ce billet, ou bien encore pour scruter les détails de certaines de ses photographies, dans cet autre article. Depuis longtemps, je savais qu’Atget, célèbre pour ses clichés du Vieux Paris, avait aussi photographié Rouen : quelques clichés du corpus normand, appartenant à la Bibliothèque de l’École des Beaux-Arts se trouvent sur Gallica depuis 2002.

La mise en ligne récente des cinquante clichés d’Atget conservés par la Bibliothèque municipale de Rouen permet désormais d’explorer la totalité des vues rouennaises du photographe. Amoureuse de la cité et grande admiratrice d’Atget, j’ai géolocalisé ces images afin de les rendre plus aisément accessibles. Dans la carte interactive ci-dessous, apparaissent en bleu les monuments encore debout, et en rouge ceux qui ont été détruits ou déplacés depuis qu’Atget les a immortalisés. La géolocalisation correspond approximativement à l’emplacement où le photographe a posé son trépied, et non à la localisation du monument photographié. Quand il existe plusieurs vues très proches d’un monument, les clichés secondaires sont matérialisés par une épingle afin de rendre la carte plus lisible.

Voir en plein écran

Chaque photographie est commentée. Pour cette tâche, je me suis notamment appuyée sur une brochure éditée en 1982 suite à une exposition sur Atget qui s’était tenue à la bibliothèque de Rouen en 1979. Lire la suite

Les taureaux de Bordeaux : Goya lithographe

Les taureaux de Bordeaux : Goya lithographe

Des gravures de Goya, on connaît surtout les Caprices et la très célèbre « Le Sommeil de la Raison engendre des monstres » qui aurait du servir de frontispice à la série. On connaît moins, en revanche, les dernières pièces de sa vie, les quatre tauromachies lithographiées. Elles comptent parmi les chefs-d’oeuvre de l’histoire de l’estampe.

Goya, Plaza Parida, les taureaux de Bordeaux, lithographie, 1825, Gallica/BnF
Goya, Plaza Parida, les taureaux de Bordeaux, lithographie, 1825, Gallica/BnF

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Pierre-Louis Pierson et Comtesse de Castiglione, Scherzo di Follia, photographie, vers 1861-1867, Metropolitan Museum

Dans le miroir, la Comtesse de Castiglione

Elle fut l’une des plus belles femmes de son temps. L’une des plus haïes également. Courtisée, adulée, jalousée, la Comtesse de Castiglione a défrayé les chroniques mondaines du Second Empire, notamment à cause de sa courte liaison avec Napoléon III.

Sans doute la Comtesse de Castiglione aurait-elle été oubliée de tous si elle n’avait pas laissé derrière elle quatre cents clichés la mettant en scène. Des images atypiques, par leur nature et leur destination, mais qui ne dévoilent presque rien de l’intimité de cette femme mystérieuse, et pour cause : toute sa vie, elle s’est employée à construire un personnage fictionnel. C’est ce qui explique que la « Dame de cœur » intrigue encore autant aujourd’hui…

Pierre-Louis Pierson et Comtesse de Castiglione, Scherzo di Follia, photographie, vers 1861-1867, Metropolitan Museum
Pierre-Louis Pierson et Comtesse de Castiglione, Scherzo di Follia, photographie, vers 1861-1867, Metropolitan Museum

De sa beauté, la Comtesse de Castiglione a toujours tiré fierté, sinon orgueil. Dès l’enfance, la jeune Virginia Oldoni Verasis (1837-1899) a été courtisée. Issue d’une noble famille florentine, elle est mariée à dix-sept ans avec un comte, Castiglione. Le mariage ne sera qu’éphémère, mais le nom restera : il était taillé pour le mythe. Lire la suite

Meryon, Ministère Marine Place Concorde

Charles Meryon et Paris, entre réalisme et fantastique

Il semblerait presque qu’une invention de Jules Verne ait envahi une vue gravée de Paris comme en produisaient de nombreux aquafortistes de la seconde moitié du XIXe siècle. Nous sommes à l’extrémité nord de la place de la Concorde. La façade latérale du ministère de la Marine se dresse, massive, à notre gauche. Le ciel est dégagé, le temps clair. Mais la foule s’agite : tous ont les yeux braqués vers le ciel. Les chevaux de la garde s’affolent tandis que des coups de fusil détonnent. On tire en l’air. Dans le ciel a surgi un étrange cortège d’êtres volants : entouré d’un escadron de poissons, un char tiré par sept chevaux survole Paris. À ses côtés vogue une pirogue mue par des ailes.

Vision fantasmagorique d’un Paris envahi de créatures étranges, cette estampe est l’œuvre d’un graveur fameux et torturé, Charles Meryon, figure emblématique et singulière, qui illustre le renouveau de l’eau-forte au milieu du XIXe siècle.

Charles Meryon, Ministère de la Marine, eau-forte, 6ème état (détail)  Gallica/BnF
Charles Meryon, Ministère de la Marine, eau-forte, 6ème état (détail) Gallica/BnF

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Une promenade au Louvre en 1803 : les dessins de Baltard

Une promenade au Louvre en 1803 : les dessins de Baltard

En 1803, Louis-Pierre Baltard réalise une série de dessins au Palais du Louvre : à la sanguine, il reproduit les ornements sculptés des façades et des plafonds. Cette série de dessins, achetée par le collectionneur Destailleurs est aujourd’hui conservée à la Bibliothèque nationale de France et numérisée sur Gallica. Curieuse, j’ai profité d’un samedi après-midi pour marcher dans les pas de Baltard et retrouver les détails qu’il avait dessinés.

Baltard, Accumulation de détails de la salle des cariatides, dessin, 1803,  Gallica/BnF
Baltard, Accumulation de détails de la salle des cariatides, dessin, 1803, Gallica/BnF

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Les voyages pittoresques et romantiques dans l’Ancienne France

Les voyages pittoresques et romantiques dans l’Ancienne France

Monument de l’édition du XIXe siècle, incontournable entreprise de l’histoire patrimoniale française, les Voyages pittoresques et romantiques dans l’Ancienne France formaient jusqu’à récemment un ouvrage aussi inaccessible que célèbre. Lourds, peu maniables et extrêmement précieux, les dix-neuf tomes des Voyages, conservés avec soin dans les bibliothèques, ne se dévoilaient qu’aux yeux des spécialistes. Aujourd’hui, tout un chacun peut les feuilleter librement grâce à la campagne de numérisation menée par la Bibliothèque nationale de France. À la suite de l’exposition « La Fabrique du romantisme » au Musée de la Vie Romantique, je vous propose de découvrir quelques-unes des 3282 planches qui illustrent cette fabuleuse aventure éditoriale.

 Fragonard, lithographié par Engelmann, Ruine du Palais de la Reine Blanche à Liry, Voyages (...), Ancienne Normandie, tome 2, 1824, Gallica/BnF
Fragonard, lithographié par Engelmann, Ruine du Palais de la Reine Blanche à Liry, Voyages (…), Ancienne Normandie, tome 2, 1824, Gallica/BnF

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Photographie coupole Caire Girault Prangey

Girault de Prangey, un pionnier de la photographie

Les photographies de Girault de Prangey figurent parmi les plus anciennes que l’on connaisse de l’Orient. Parmi les plus côtés également… Pourtant, ce n’est que très tardivement qu’a été redécouverte cette figure singulière, aristocrate sans descendance, artiste érudit et aventurier. La Bibliothèque nationale de France possède une très belle collection de ses daguerréotypes que je vous invite à découvrir sur Gallica.

La vie de Joseph Philibert Girault de Prangey (1804-1892) est fascinante à bien des titres : artiste et érudit, il a été un des premiers photographes de l’Orient. Ses centaines de clichés ont traversé le XXe siècle dans le plus grand secret, avant d’être redécouverts à l’aube du XXIe siècle.

Girault de Prangey, Coupole au Caire,  daguérreotype,  1843
Girault de Prangey, Kaire, S. Kérabat, Coupole, daguérreotype, 1843, Gallica/BnF

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Londres, banlieue, misère, rail, Gustave Doré

Entre mythe et réalité, Londres vu par Gustave Doré

A en observer le nombre de visites guidées proposées aux touristes dans l’East End, le Londres populaire de la fin XIXe siècle fait encore frissonner les imaginations : ruelles sombres de Whitechapel, ballets des dockers, crimes de Bricklane, misère des prostituées… Si le souvenir est fort, il faut se demander à quelles images se réfère notre mémoire collective. Quelques adaptations cinématographiques de Dickens, une vignette d’un journal de faits divers titrant en 1888 sur Jack l’Éventreur, et, surtout, des illustrations fascinantes de Gustave Doré. En effet, vers 1870, l’artiste, qui séjourne alors régulièrement à Londres, illustre l’un de ses chefs-d’oeuvre, London, a pilgrimage, qui va marquer la culture visuelle de toute une époque. Frappantes, ses images du petit peuple londonien sont-elles pour autant le reflet d’une réalité ? Ne témoignent-elles pas plutôt de la vision fantasmée d’un illustrateur poète à l’imagination débordante? 

Londres, banlieue, misère, rail, Gustave Doré
Gustave Doré, Over London by rail, planche pour London, a pilgrimage, 1872, BnF/Gallica

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Les coffrets à estampe

Les coffrets à estampe

Gallica s’est récemment enrichi de 15 « coffrets à estampe », précieux trésors de la Réserve du département des Estampes et de la photographie. Caractérisées par la présence d’une image imprimée au revers de leur couvercle, ces boîtes datées de la fin du XVe siècle ont fait couler beaucoup d’encre, tant leur usages demeurent mystérieux.

Coffret à estampe à la Crucifixion, vers 1490/1500, Gallica/BnF
Coffret à estampe à la Crucifixion, vers 1490/1500, Gallica/BnF

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Avant le périph’, la zone et les fortifs’

Avant le périph’, la zone et les fortifs’

Le boulevard périphérique ceinture fermement le Paris d’aujourd’hui. Mais qu’en était-il hier? Les abords de la capitale ont maintes fois changé de visage au cours de l’histoire. A la fin du XIXe siècle et au début du XXe, la « Zone » entourait la capitale. Cette bande de terrains vagues précédait l’enceinte défensive érigée par Thiers. Décrétée inconstructible, elle est pourtant rapidement devenue le refuge d’une population aussi miséreuse que nombreuse. Inquiétant le bourgeois, préoccupant le politique, la Zone est aujourd’hui associée au mythe des bas-fonds parisiens. Les photographies qu’en firent Atget et les employés des agences Rol et Meurisse témoignent de la réalité sociale malheureuse.

Agence Rol, Zoniers d'ivry, 1913, Gallica
Agence Rol, Zoniers d’ivry, 1913, Gallica

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L’âge d’or du papier peint est dans Gallica

L’âge d’or du papier peint est dans Gallica

Le département des estampes et de la photographie de la BnF conserve une singulière collection d’échantillons de papiers peints de la fin du XVIIIe siècle. Constituée entre 1799 et 1803 à la faveur des lois du dépôt légal mises en place pendant la période révolutionnaire, cette collection rassemble 2250 échantillons aux couleurs extraordinairement bien conservées. Jusqu’à leur numérisation en octobre 2007, ces pièces étaient très difficiles d’accès, leur fragilité rendant quasi impossible leur consultation. Or, ce corpus est une source riche et parfaitement documentée pour qui s’intéresse à l’histoire du papier peint à la fin du XVIIIe siècle : tous les échantillons sont inscrits du nom de leur fabriquant, du numéro de catalogue et de leur date de dépôt…

Jacquemart et Bénard , papier peint à motif répétitif, 1803
Jacquemart et Bénard , papier peint à motif répétitif, 1803

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Vues panoramiques sur Istanbul (1875-1895)

Vues panoramiques sur Istanbul (1875-1895)

Aujourd’hui, notre aéroplane se pose à Istanbul pour une exploration de la ville à la fin du XIXe siècle. Le support de notre voyage immobile consiste en deux vues panoramiques de la ville, saisies depuis la tour de Galata à vingt ans d’intervalle par les photographes Mihran Iranian et Pascal Sebah. Ces clichés témoignent de l’évolution urbaine de la capitale turque durant le dernier quart du XIXe siècle. Par leur qualité exceptionnelle, ces photographies sont également le reflet du dynamisme de l’industrie photographique en Orient à la même période.

Pascal Sebah, Panorama de Constantinople pris de la tour de Galata, 1875, INHA
Pascal Sebah, Panorama de Constantinople pris de la tour de Galata, 1875, INHA (détail)

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15.360 clichés des demi-mondaines à découvrir sur Gallica, les albums Reutlinger numérisés

15.360 clichés des demi-mondaines à découvrir sur Gallica, les albums Reutlinger numérisés

Depuis quelques semaines, les Gallicanautes peuvent découvrir en ligne la soixantaine d’albums de Léopold Reutlinger que le département des Estampes et de la photographie de la BnF conserve. Près de 15 360 clichés, réalisés entre 1875 et 1917 qui figurent tout ce que Paris compte de cocottes, demi-mondaines et actrices. C’est pour marquer l’arrivée de ce nouveau corpus sur Gallica que j’ai décidé de publier une série de billets donnant un aperçu de sa richesse. Pour ce premier numéro, il s’agit de présenter la maison Reutlinger.

Photographie de Mata Hari par Reutlinger
Reutlinger, Mata Hari, (tome 39, vue 6), photographie, Gallica/BnF

Nadar, Reutlinger, Disderi, voici le nom des studios où il était de bon ton de se faire photographier. Si le studio de Nadar était plutôt spécialisé dans le gotha intellectuel, la maison Reutlinger comptait dans sa clientèle une myriade d’actrices, artistes de scène, chanteuses de music-hall et autres cocottes.

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Le monde dans une boîte. Voyage à travers les vues d’optiques de Gallica

Le monde dans une boîte. Voyage à travers les vues d’optiques de Gallica

Sous le titre « vues d’optique » est désigné un type spécifique de la production gravée du XVIIIe siècle : des images en perspective, souvent coloriées à la main et destinées à être regardées à travers une boîte d’optique qui en accentue l’effet de profondeur. Près d’un millier de ces estampes a été numérisé sur Gallica: Orion en aéroplane vous propose de les découvrir, pour un périple de papier à travers le monde et le temps! 

Vue d'optique représentant le Pont de St Michel à Paris, vers 1750, sans nom d'éditeur, Gallica/BnF [détail]
Vue d’optique représentant le Pont de St Michel à Paris, vers 1750, sans nom d’éditeur, Gallica/BnF [détail]

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1886-1896 : l’Affichomanie. Parcours sur Gallica autour des premiers collectionneurs d’affiches.

1886-1896 : l’Affichomanie. Parcours sur Gallica autour des premiers collectionneurs d’affiches.

Décennie 1890, Paris se couvre d’affiches. La loi de juillet 1881 a instauré la liberté d’affichage. Aucune palissade, aucun pan de mur, pas même celui d’un lieu sacré n’est épargné par la frénésie du collage. S’accumulent sur le bois, la brique ou la pierre des couches de papiers aux couleurs vives. Belles images, les affiches sont conçues comme éphémères. A peine lacérée, à peine la couleur un peu passée, voici qu’on la couvre d’une autre. Pourtant, nos bibliothèques et nos musées conservent de cet âge d’or de l’affiche illustrée des témoins représentatifs et nombreux. Aussi éphémère soit-elle, l’affiche a survécu, a été conservée. Les collections publiques sont nées du dépôt légal, versé par les principaux imprimeurs, mais aussi des dons de généreux amateurs, qui, pris de passion pour ces images colorées, les ont accumulées dans leur cabinet, avant de s’en défaire au profit du patrimoine national.

Il est remarquable de constater que la figure du collectionneur d’affiches est née en même temps que l’affiche illustrée elle-même. Dès les premiers développements de la réclame chromolithographiée, des connaisseurs accumulent ces images nouvelles et industrielles.

Centenaire lithographie affiche alesi
Hugo d’Alési, Exposition du Centenaire de la lithographie Galerie Rapp, 1895

Aussi précoce soit-elle, cette mode de collectionnisme fut éphémère. Son acmé coïncide avec l’âge d’or de l’art de l’affiche, que l’on peut situer entre 1886 et 1896. Quelques années pendant lesquelles l’Affichomanie, terme forgé en 1891 par Uzanne, triomphe.

A travers les collections numérisées de Gallica, je vous propose un itinéraire à la découverte de cette mode, de sa naissance dans un milieu d’hurluberlus décolleurs d’affiches à sa consécration qui mènera à son déclin.

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