Bilipo, une bibliothèque exclusivement vouée à la littérature policière

Bilipo, une bibliothèque exclusivement vouée à la littérature policière

La plus grande bibliothèque de littérature policière au monde… est parisienne! La Bilipo, sise au coeur du cinquième arrondissement, conserve plus de 100 000 documents. Petite visite de cette institution insolite.

Des bibliothèques spécialisées de Paris, on vous dira qu’elle est celle qui est dotée du nom le plus « mignon »…. et énigmatique. Bilipo n’est pas une bibliothèque pour la jeunesse, encore moins une bibliothèque sur l’Oulipo, mais la bibliothèque des littératures policières. Installée depuis 1995 dans le cinquième arrondissement de Paris, cette bibliothèque unique au monde et richement fournie ravit les amateurs de romans noirs et de faits divers sordides.

Les drames de la cocaïne

Lire la suite

Tutoyer le musée du Louvre

Tutoyer le musée du Louvre

Cinq ans d’études à l’École du Louvre, des milliers d’heures passées à arpenter les innombrables salles du palais du même nom. Munie d’une carte « magique » conférant un accès gratuit et illimité aux collections, j’ai appris à tutoyer le Musée du Louvre.

Pyramide du Louvre, automne 2013
Pyramide du Louvre, automne 2013

Le rapport qu’un étudiant en histoire de l’art entretient avec le musée est de l’ordre de l’intime et du singulier. Les trois premières années de l’École du Louvre impliquent de passer beaucoup de temps « au contact direct des œuvres », un principe qui est la marque de fabrique de l’institution. Aux centaines d’heures de travaux dirigés devant les œuvres (T.D.O.) se succèdent autant de temps à réviser dans les mêmes salles. Tout élève assidu en vient à connaître par cœur les chemins qui conduisent de la Victoire de Samothrace à la cour Marly, de la Joconde aux appartements de Napoléon. Les heures de pointe, les raccourcis, les jours tranquilles, les flux de touristes, la quiétude des salles isolées sont autant de choses que nous connaissons parfaitement.

Lire la suite

La drôle de vie d’une matrice d’estampe, ou comment Charles X est devenu Louis-Philippe

La drôle de vie d’une matrice d’estampe, ou comment Charles X est devenu Louis-Philippe

Une image peut en cacher une autre, ou comment les éditeurs d’estampes ‘actualisaient’ leurs fonds… 

Petit imprimeur d’imagerie populaire installé à Nancy, François Desfeuilles décide d’éditer un portrait du souverain en place. Son jeune collaborateur, le graveur Jean-Baptiste Thiébault réalise une estampe représentant Charles X, laquelle est déposée par Desfeuilles le 31 mai 1830. Manque de bol pour notre éditeur, la révolution de Juillet intervient. Charles X abdique le 2 août, et, sept jours plus tard, Louis-Philippe est intronisé roi des Français.

Jean-Baptiste Thiébault, Louis-Philippe Ier, roi des Français, 1830, xylographie, ed. Desfeuilles, Nancy (BnF, estampes)
Jean-Baptiste Thiébault, Louis-Philippe Ier, roi des Français, 1830, xylographie, ed. Desfeuilles, Nancy (BnF, estampes)

Que faire du portrait d’un souverain qui n’est plus roi de rien ? Il n’y a plus d’acheteurs pour cette image tandis que la demande risque d’être forte pour le portrait du nouveau roi des Français, Louis-Philippe. Desfeuilles ne veut pas rater cette mane, d’autant que le contexte est devenu difficile pour sa fabrique : depuis quelques années, il est concurrencé par deux autres éditeurs qui se sont installés à Nancy et qui publient, comme lui, des images populaires. Desfeuilles veut donc être le premier à commercialiser le portrait de Louis-Philippe pour leur couper l’herbe sous le pied!

Lire la suite

Les musées font leur pub (1) : le Musée de l’histoire de l’Immigration

Les campagnes de publicité des musées sont décidément très réussies ces temps-ci. Dernièrement, les parisiens ont vu fleurir dans le métro et sous les abribus les nouvelles affiches du musée de l’histoire de l’Immigration.

Nos ancêtres n'étaient pas tous des gaulois

Quatre slogans chocs imprimés en grosses lettres blanches sur des photographies sépia des années 60. « 1 français sur 4 est issu de l’immigration » ; « L’immigration ça fait toujours des histoires »; « Ton grand père dans un musée ! » ; « Nos ancêtres n’étaient pas tous des gaulois ». 

Visuellement, ça m’évoquait un peu la charte graphique des Archives Nationales, et j’ai d’abord penché pour la pub d’une O.N.G avant d’identifier l’institution concernée : la Cité de l’Immigration (dont le titre exact est aujourd’hui Musée de l’histoire de l’immigration).

Des slogans chocs pour susciter le dialogue et encourager la visite

Avec des phrases aussi directes, clairement ancrées dans les débats de société, dans un contexte de tension sociale chaque jour un peu plus perceptible, le pari était osé. C’est sans surprise que j’ai vu, dès les premiers jours de la campagne, les premiers vandalismes fleurir sur ces affiches. « Dehors ! Dehors ! » avait inscrit une main sur le slogan « 1 français sur quatre est issu de l’immigration ». « Malheureusement » précédait maintenant « Nos ancêtres n’étaient pas tous des gaulois » dans une autre station.

un français sur quatre

Un vandalisme à déplorer, mais qui – paradoxalement – témoigne de la pertinence de cette campagne publicitaire et marque son efficacité. Les affiches suscitent des réactions, qu’elles soient positives ou négatives. Certains débattent du sens des slogans dans les rames, avec un proche, un collègue ou un inconnu, d’autres taguent, mais rares sont ceux qui n’y jettent pas au moins un regard intrigué.

Percutantes, les affiches invitent au dialogue et inscrivent le musée dans l’espace public. Or, n’est-ce pas là l’un des buts des institutions muséales que de susciter l’échange, le dialogue ?

tweet 4

Changer l’image d’un jeune musée [mé/mal]connu

La cité de l’immigration est une institution jeune. Ouverte en 2007, la nouvelle institution a été marquée par le contexte tendu dans laquelle elle est née : en pleine ère Sarkozy, la Cité a eu a souffrir d’une mauvaise appréhension du message qu’elle entendait délivrer.  Associée par la force des choses à l’action du pouvoir en place vis-à-vis des problématiques migratoires, la Cité a été perçue par une partie de l’opinion comme un musée instrumentalisé. Depuis, des élections sont passées par là, mais le musée est toujours taxé de « propagandisme » par ses détracteurs. Il est pourtant révélateur de souligner que l’institution n’a jamais été officiellement inaugurée et qu’elle attend toujours qu’un Président de la République s’y déplace!

tweet 1

tweet 5

Autre difficulté pour la jeune cité : le lieu qui l’accueille n’est pas neutre. Le Palais de la Porte Doré, chef-d’œuvre de l’architecture art déco, construit pour l’Exposition coloniale de 1931, a longtemps abrité le Musée national des arts d’Afrique, d’Asie et d’Océanie dont les collections ont été versées au Musée du Quai Branly. Certains visiteurs y cherchent encore trop souvent ces collections, ou s’attendent à y découvrir l’histoire des colonies ou des Dom-Tom.

La campagne publicitaire a donc pour ambition de renouveler l’image du musée. En délivrant un aperçu plus clair du contenu du musée, il s’agit de conquérir de nouveaux publics et d’inciter à la visite. A tous, les affiches adressent le constat qu’ «un français sur quatre est issu de l’immigration » et que « Nos ancêtres n’étaient pas tous des gaulois ». Un quart des français dont ni l’histoire personnelle ni la généalogie n’est anecdotique puisque largement partagée au sein de la population. Sur la photographie, quatre écoliers regardent ensemble un territoire commun, patrimoine de la Nation.

couple

« L’immigration ça fait toujours des histoires » proclame une autre affiche, illustrée d’un jeune couple de danseurs à un bal populaire. C’est peut-être le slogan le plus osé de la campagne puisqu’il assume clairement le caractère polémique de son sujet dans le contexte social actuel. Un internaute a récemment suggéré sur twitter que l’on fasse précéder « histoires » de « belles », mais la photo dit ce que les mots taisent…

tweet 3

Ton grand père dans un musée

« Ton grand-père dans un musée » interpelle directement le français dont un ancêtre a fait, il y a quelques décennies, le choix de la France. Ce slogan, qui vise ce quart de la France « issu de l’immigration » est symboliquement fort. Le musée est la vitrine du patrimoine, l’endroit où l’Histoire de la Nation s’expose. Entré au musée, l’immigrant d’hier est reconnu comme appartenant à cette Histoire au même titre que le serment du jeu de Paume, une relique royale ou la carte d’un électeur du XIXe siècle. D’ailleurs, le changement récent de l’intitulé de l’institution est révélateur de cette volonté : le titre de Musée, qui a remplacé celui du Cité lui donne une force symbolique nettement supérieure. Durant la dernière décennie, on a renommé à tour de bras des institutions en « cité » voulant véhiculer une image plus dynamique, jeune, vivante que le traditionnel « musée », jugé « poussiéreux ». Retour de balancier, on se rend aujourd’hui compte que le titre « cité » a surtout brouillé les cartes pour le visiteur qui découvre l’institution : on a des cités administratives, des cités des sciences, des cités sensibles, et…  une cité de la céramique, une cité de l’architecture… 

tweet 6

Faut-il un musée pour l’histoire de l’immigration ? Réflexion d’une néophyte sur les musées « d’identité »

Un musée des Arts et traditions populaires (mort), un musée de l’histoire de France (à Versailles, fermé depuis longtemps et pour encore longtemps), un projet d’une maison d’histoire de France (enterré), un Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (nouveau-né), un musée de l’histoire de l’immigration… cinq institutions, l’une disparue, la seconde soustraite aux yeux du public, la troisième jamais concrétisée, les deux dernières très récentes, pour parler d’un même sujet : l’identité et de son histoire au sein d’une culture mondialisée. Nationales, régionales, locales ou communautaires, fallait-il donc tant de musées pour parler de l’identité, des identités ?

Je fais partie de ceux qui regrettent le défunt M.N.A.T.P. imaginé par Rivière dans les années 30 et ouvert au lendemain de la seconde guerre mondiale. Le MuCEM a hérité des collections d’arts et traditions populaires françaises mais son projet scientifique et culturel, axé, comme son titre l’indique, sur les Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, ne les exploitera pas à leur juste mesure. Le projet du MuCEM est pourtant louable et même nécessaire, mais avec de si riches collections, n’y avait-il pas de quoi faire vivre les deux musées, possiblement sous une direction commune ?

tweet 2

Quant au Musée de l’histoire de l’Immigration, il est légitime en ce qu’il affirme comme appartenant à l’histoire nationale une partie de la population dont jusqu’alors on ne reconnaissait pas assez la place. Cependant, on pourrait reprocher à la Cité de l’immigration, en étant consacrée à la seule histoire des immigrants de l’isoler volontairement du reste de l’Histoire nationale. De ce fait, on pourrait réclamer un musée d’histoire de la Nation, qui traite tout autant des arts et traditions populaires régionaux que de l’immigration ou que de la Révolution. Bref, un véritable musée de l’histoire commune.

Note: cette réflexion n’est pas issue d’une expérience de visite personnelle des trois musées cités mais des échos de leurs programmes respectifs qu’en ont fait la presse et les réseaux sociaux. Il est donc totalement subjectif et potentiellement erroné.

Pour conclure en revenant à nos moutons, c’est-à-dire la campagne publicitaire de la Cité de l’Immigration, sachez qu’elle m’incite très fortement à la visite ! Ce sera l’occasion de revoir ma réflexion au regard du message délivré dans l’espace muséologique.

Pour aller plus loin: si le sujet vous intéresse, ne manquez pas l’interview de Mercedes Erra sur le blog Culture et communication (signalé par Louvre pour tous). Il y est rappelé que cette très belle campagne publicitaire a fait l’objet d’un mécénat de compétence : la RATP, JC Deceaux, Le Monde, TV Magazine et Psychologie ont gratuitement mis à disposition les panneaux d’affichage tandis que l’agence BetC s’est chargée de la conception graphique. Pour suivre les réactions des internautes à la campagne, il existe aussi un storify consacré à cette question.

Des trains royaux. Quand la Galerie des Glaces prend le RER.

Des trains royaux. Quand la Galerie des Glaces prend le RER.

Depuis leur lancement il y a quelques mois, je les avais empruntées à deux ou trois reprises. Mais ces derniers jours, je suis tombée sur les rames « Versailles » du RER C trois fois de suite. L’occasion de prendre quelques photos et de leur consacrer un billet.

RER C train Versailles

Alors que le matériel roulant de la ligne C du RER fait l’objet d’un progressif renouvellement, l’état d’usure des plus anciennes rames se fait de plus en plus criant en regard des voitures flambantes neuves. Pour lutter contre cette disparité la SNCF a mis en œuvre une solution originale : en attendant leur remplacement, cinq trains ont été relookés à moindre coût. Et pas n’importe quel relooking, un relooking royal ! Les deux étages des wagons se sont transformés en Galerie des Glaces, Galerie des Batailles, Grand Trianon, bibliothèque du roi et autres pièces Versaillaises emblématiques.

C’est pour le château de Versailles, desservi par ces trains, un bon coup de pub, qui vise autant les touristes (10% des usagers de la ligne) que les utilisateurs quotidiens dont on espère susciter la visite du monument.

RER C VersaillesLe contraste entre l’extérieur vieillissant des trains et l’intérieur coloré est saisissant. Il est très plaisant d’admirer les plafonds dans des conditions qui n’ont rien à envier à la vraie Galerie des Glaces. En effet, les peintures reproduites sur les parois du train, plus proches de nous, se prêtent mieux à la contemplation qu’au milieu de la foule qui piétine les couloirs du château. Un peu plus et on pourrait y faire des T.D.O de l’Ecole du Louvre. Si on observe mieux le programme iconographique conçu par Le Brun, on ne peut en revanche pas le relier à son contexte architectural.

La technique mise en œuvre pour le relooking de ces trains est assez simple : d’immenses autocollants en vinyle sont venus couvrir les plafonds et les parois. On imagine le casse-tête qu’a dû être l’adaptation de l’œuvre originale à cet espace confiné. Evidemment, en écrivant ces lignes, je pense à Albert Robida, qui aurait certainement beaucoup apprécié cette initiative. Dans un précédent billet, j’avais cité ce passage où, imaginant les développements à venir de la photographie, il rêvait de papier peint permettant de reconstituer les Noces de Cana dans un modeste appartement.

L’originalité des RER « Versailles » est d’avoir renouvelé l’idée des stickers autocollants comme support promotionnel dans les transports. Alors que d’habitude on relooke l’extérieur des voitures (il y a d’ailleurs eu de très belles réussites sur le métro de Rouen), ici c’est l’intérieur qui a été visé… car finalement c’est là que le voyageur passe le plus de temps !

Si elles surprennent les voyageurs et égayent le trajet quotidien, les belles rames ne font pas oublier aux usagers leurs récriminations contre les incidents qui émaillent trop souvent leur parcours.

RER C Versailles chambre Reine

Le succès des rames relookées et le recul du vandalisme observé dans les trains concernés a incité la SNCF a renouveler l’opération. Circule donc maintenant un train aux couleurs des tableaux impressionnistes du musée d’Orsay sur la ligne J (Paris- Saint-Lazare / Vernon / Mantes la Jolie/ Gisors). Si les voyageurs de la branche Versailles-rive gauche ont 25% de chance de tomber sur un train relooké, il est plus difficile pour les usagers de la ligne de J d’emprunter une rame impressionniste, puisqu’un seul train est pour l’instant concerné par cette opération.

Au-delà de ces coups de marketing culturel, je rêve d’une généralisation de cette pratique… Comme les transports en communs seraient plus agréables ! Qu’il serait fabuleux d’inviter des artistes, des designers, des graphistes, des graffeurs à proposer leur propre pelliculage! Et par sa complexité technique, la conception d’un décor pour un wagon formerait un bel exercice dans les écoles d’art ! Alors, la SNCF, on lance un concours jeunes créateurs ?

Nuit des musées 2013 : sous le Louvre, la nuit, le C2RMF.

Nuit des musées 2013 : sous le Louvre, la nuit, le C2RMF.

Pour la Nuit des Musées, le Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF) ouvrait de façon exceptionnelle ses portes. Quatre mille cinq cent mètres carrés de laboratoire sous les parterres du Louvre où sont analysés, étudiés et restaurés les objets des collections françaises. Un endroit fascinant où se concentrent un personnel scientifique hautement qualifié et un outillage technologique de pointe, au service des œuvres. Si vous avez raté le rendez-vous, je vous emmène en séance de rattrapage, photographies à l’appui. 

Radiographie de bronzes antiques

Lire la suite

Carte postale de l’atelier de fresque, à l’Ecole des Beaux-Arts

Carte postale de l’atelier de fresque, à l’Ecole des Beaux-Arts

Parfois même les lieux familiers vous réservent bien des surprises. Derrière un escalier du Palais des Etudes de l’Ecole des Beaux-Arts, que j’ai tant fréquenté, une porte, une courette où j’aimais venir voir les pierres lithographiques entreposées. Et, au-delà de cette courette, un atelier que je n’avais jamais pénétré, l’atelier de fresque de Philippe Bennequin. Un endroit merveilleux, lumineux, aux murs d’un chromatisme chatoyant et au bazar rassurant, avec ses tables entières couvertes de petits pots remplis de poudres colorées.

atelier fresque Ecole Beaux-Arts Bennequin (2)

Égarées dans les entrailles de l’Ecole, mon amie Chloé et moi avons chaleureusement été accueillies par le maître des lieux, Philippe Bennequin. Lire la suite

Chambre double, une station de métro comme oeuvre d’art.

Chambre double, une station de métro comme oeuvre d’art.

C’est un spectacle régulier auquel les usagers de la ligne 12 sont habitués mais qui pourrait bientôt cesser. Une étrange mue se déclenche tous les trois mois à la station Assemblée nationale. L’espace de quelques jours, les parois concaves des quais se parent de déchirures jaunes, noires, rouges, bleues et blanches. L’espace de quelques jours, la station Assemblée nationale prend des allures d’une immense affiche lacérée à la Villeglé. Et puis, on refait le papier peint.

Blais, chambre double assemblée nationale

Lire la suite

La visite au musée : le provincial au Louvre en 1841

En attendant la nuit des musées ce week-end, Gallica vous propose une journée des musées à travers les nombreux documents numérisés disponibles sur la bibliothèque en ligne. Je profite de l’événement pour vous annoncer la création d’une nouvelle rubrique sur ce blog, intitulée « La visite au musée« . A la manière de ce que fait Virgile Septembre sur son excellent tumblr, cette nouvelle catégorie sera nourrie d’extraits littéraires, d’images anciennes et de divers documents mettant en scène les visiteurs des musées. Pour ce premier billet, nous suivons un provincial dans sa visite du Louvre en 1841.

Un provincial au Louvre en 1841. Extrait de la physiologie du provincial à Paris, pp. 67-71.

Physiologie du provincial à Paris, p.67« Il va sans dire que le provincial consacre une de ses premières expéditions à la visite du Musée, qu’il appelle et qu’il écrit: Musaeum, pour prouver qu’il a fait ses humanités. Il n’y va pas le dimanche; -car c’est bon pour le peuple, pour les Parisiens vulgaires. Lui, provincial, a des privilèges. Avec son passe-port, le Louvre lui est ouvert tous les jours. C’est là un des bénéfices, une des prérogatives de sa qualité, c’est un avantage qu’il possède sur les indigènes, et il en use avec une noble, une risible fierté.
Le moment où notre provincial visite les tableaux du Louvre, est l’heure matinale employée aux études classiques. Trente chevalets sont plantés dans la galerie. Des artistes des deux sexes se livrent à la copie des maîtres. Des demoiselles reproduisent l’académie pure sous l’oeil maternel. Les mamans tricotent en rêvant l’avenir raphaélique de leur fille. Les rapins vont choisir leurs modèles sous les corniches, et travaillent perchés au bout d’une échelle comme de simple peintres d’enseigne, se préparant ainsi peut-être à la haute mission que leur réserve l’avenir.
L’arrivée d’un oisif, d’un curieux, produit nécessairement un mouvement de distraction parmi les travailleurs. la tournure du provincial, son costume, produisent leur effet. On le lorgne en souriant, en ricanant. Sept ou huit copies de Rubens, de Rembrandt, de Léonard de Vinci sont momentanément abandonnées pour une mois grave composition. De caustiques crayons esquissent rapidement sur le papier une caricature, ou plutôt un portrait aussi ressemblant que s’il avait été procrée par l’opération du daguerréotype.
– Que signifie ceci? s’écrie le provincial, dont l’indiscrète curiosité s’est égarée par-dessus l’épaule d’un des dessinateurs.
– Vous le voyez bien, répond l’artiste sans se déconcerter.
physiologie du provincial à Paris, p.70-Je trouve cette plaisanterie assez déplacée! répond le provincial, mécontent de voir son image si peu flattée.
-Qu’appelez vous une plaisanterie! s’écrie l’artiste; rien n’est plus sérieux. Voici le fait: Je suis attaché au Journal des Modes, pour les gravures. L’apparition d’un dandy tel que vous, était une bonne fortune: je l’ai saisie. Votre élégant costume fera l’ornement du prochain numéro.
A
 ces mots, le provincial sourit, s’excuse, salue, remercie, se rengorge et s’éloigne en faisant la roue et en se disant:
– Voilà que je vais donner le ton aux merveilleux de Paris! je suis le type de l’élégance. »

Le musée des moulages de l’Université de la Sapienza – Rome

Le musée des moulages de l’Université de la Sapienza – Rome

Vous ne trouverez pas ce musée dans les guides touristiques, pas même dans ceux qui vous promettent une visite curieuse et insolite de Rome. Fondé en 1892, le Muséo Dell’Arte Classica est pourtant l’une des rares collections universitaires de moulages encore pleinement intégrée au campus moderne.

Museo Dell'Arte classica Sapienza (5)

Lire la suite

Dans les coulisses du musée: montage de l’exposition Geoffroy Dechaume à la Cité de l’architecture et du patrimoine

Dans les coulisses du musée: montage de l’exposition Geoffroy Dechaume à la Cité de l’architecture et du patrimoine

L’exposition « Dans l’intimité de l’atelier, Geoffroy-Dechaume (1816-1892), sculpteur romantique » sera inaugurée demain soir. A l’invitation de la Cité de l’architecture et du patrimoine, j’ai eu la chance d’assister au montage de l’exposition et de bénéficier de quelques explications de sa commissaire, Carole Lenfant.

L’exposition « Dans l’intimité de l’atelier, Geoffroy-Dechaume (1816-1892), sculpteur romantique »

Grace à la donation récente de la famille Geoffroy-Dechaume, la cité de l’architecture et du patrimoine s’est vue dotée de près de 4700 pièces issues du fonds d’atelier de ce sculpteur intiment lié à l’histoire du musée des Monuments français, dont il fut l’un des premiers directeurs.

IMG_0765
Moulages en cours d’installation.

Lire la suite

Au Louvre, une spectaculaire opération de moulage du Milon de Crotone

Au Louvre, une spectaculaire opération de moulage du Milon de Crotone

Les visiteurs du Louvre avaient dernièrement un drôle de spectacle à admirer dans la cour Puget. Le chef d’œuvre du lieu, le Milon de Crotone, sculpté entre 1671 et 1683 par Pierre Puget était entouré d’une palissade. Les mezzanines alentours offraient une vue imprenable sur ce qui se passait derrière cet échafaudage. Autour du monumental bloc de marbre de Carrare, deux personnes en combinaison blanche s’activaient. Un spectacle assez rare qui se jouait : le moulage d’une œuvre pour en tirer des copies fidèles.

Moulage du Milon de Crotone au Louvre 1

Lire la suite

La plus fabuleuse bibliothèque publique d’Europe: O.B.Amsterdam

Ayant eu vent de la très belle vue offerte par la terrasse de l’OBA, la bibliothèque publique d’Amsterdam, je l’avais inscrite à ma liste des visites à faire lors de mon séjour dans la capitale néerlandaise. Plus que pour la vue, c’est pour la bibliothèque en elle-même que j’ai eu un coup de foudre. 

OBA Bibliothèque AmsterdamInstallée depuis 2007 près de la Gare centrale, dans un quartier en pleine réhabilitation, à deux pas du centre-ville, la bibliothèque publique d’Amsterdam se déploie dans un édifice d’une incroyable qualité: espace, design, aménagement, confort, tout est réussi. Avec 28 000 m2, c’est la plus grande bibliothèque publique d’Europe. Sept niveaux sont accessibles aux lecteurs, qui y trouvent quelques 1000 places assises et 600 postes informatiques.

Un bâtiment et un design réussi

Pour concevoir la nouvelle bibliothèque, les moyens n’ont pas été négligés : un budget de 70 millions d’euros avait été alloué au projet. Une belle enveloppe qui a permis à la ville d’Amsterdam de s’offrir les services d’un architecte spécialiste des bibliothèques, Jo Coenen. Et quelle réussite!

OBA Bibliothèque Amsterdam

Une grande bibliothèque, répartie sur sept niveaux, ça aurait pu être assez monotone, avec des espaces qui un peu répétitifs dans leurs volumes. Et non! Les étages se suivent et ne se ressemblent pas. Il y a du rythme, de la dynamique dans l’enchaînement des zones. Oubliée la version classique du grand puits de lumière que l’on retrouve souvent dans les bibliothèques moderne ! Ici, l’élément « puits de lumière » est traité de manière très subtile: il prend des formes variées suivant les étages, créant de beaux jeux de points de vues et de perspectives, excellemment sténographiés et cela sans jamais que l’on ne ressente de sentiment de vertige ou d’écrasement. Malgré cette disposition hétérogène autour du puits, l’architecte a su donner au volume intérieur une unité et une harmonie.

OBA Bibliothèque Amsterdam

Chaque espace de la médiathèque dispose d’une identité visuelle marquée. On retient surtout l’espace dévolu à la musiqueOBA Bibliothèque Amsterdam et aux films avec ses belles étagères cylindriques et l’espace des enfants, très ludique. Au sous-sol du bâtiment, la bibliothèque des petits est bien accueillante, avec son ours géant, ses étagères arrondies et sa cabane. On y retrouve un confort de lecture « comme à la maison » : tapis, coussins, gros fauteuils rouges qui appellent petits et grands à s’y lover. En retrait, divers espaces d’ateliers, le « kinderlab », ont été aménagé pour accueillir les nombreuses activités de l’institution. Et comme la bibliothèque conserve une belle collection de livres de jeunesse anciens, certains sont présentés par roulement dans des vitrines, avec un écran tactile permettant d’en manipuler des versions numérisées.

OBA Bibliothèque Amsterdam

A mon sens, l’autre grande réussite de l’architecte réside dans l’exploitation qu’il fait du paysage. Avec la hauteur du bâtiment et l’espace dégagé qui le précède, la vue sur Amsterdam est époustouflante. Agréable, oui, mais… Toute personne qui a déjà été à la bibliothèque du musée du Quai Branly sait à quel point il est difficile de travailler quand on a un paysage merveilleux sous les yeux (au MQB, c’est une vue à + de 180° sur Paris). C’est pas pour rien que Labrouste avait mis des fenêtres hautes à la Bibliothèque Sainte-Geneviève! Le paysage, c’est l’élément numéro 1 de distraction pour tout étudiant dans une bibliothèque. Bon, là, me direz-vous, la question se posait de façon moins cruciale étant donné qu’il s’agit d’une bibliothèque publique municipale. Il n’empêche que le parti-pris de l’architecte est bien pensé: jamais d’immenses baies vitrées courant sur toute la longueur de la façade, mais des baies qui encadrent avec soin des portions du paysage. La ville se dévoile par fragment, discrètement. Le touriste qui voudra emporter une belle carte postale se rendra sur la terrasse au dernier étage pour embrasser la vue d’un seul regard (mais seulement l’été, car malheureusement, l’accès est fermé une bonne partie de l’année…)

OBA Bibliothèque Amsterdam

Quand la bibliothèque devient un lieu de vie

Le rêve de tout étudiant néo-rat de bibliothèque: une institution ouverte 7 jours sur 7, de 10h à 22h ! Un modèle que l’on aimerait bien voir généralisé ! Outre de riches collections, dont près d’un quart sont en libre accès, le visiteur peut ici assister à toutes sortes d’activités : représentations théâtrales, exposition, conférences, émission radio… La devise de l’institution : « il y a toujours quelque chose à faire à l’OBA ». Même manger ! En effet, une cafétéria est installée au dernier étage !

Visitée par 5000 usagers par jour, l’OBA est une institution phare, à la tête d’un réseau de 27 bibliothèques municipales. La construction de ce bâtiment, en 2007, a largement participé à la restructuration – toujours en cours – de ce quartier portuaire, à deux pas du centre ville !

[slideshow]

site officiel de la bibliothèque