Dans les coulisses du musée: montage de l’exposition Geoffroy Dechaume à la Cité de l’architecture et du patrimoine

Dans les coulisses du musée: montage de l’exposition Geoffroy Dechaume à la Cité de l’architecture et du patrimoine

L’exposition « Dans l’intimité de l’atelier, Geoffroy-Dechaume (1816-1892), sculpteur romantique » sera inaugurée demain soir. A l’invitation de la Cité de l’architecture et du patrimoine, j’ai eu la chance d’assister au montage de l’exposition et de bénéficier de quelques explications de sa commissaire, Carole Lenfant.

L’exposition « Dans l’intimité de l’atelier, Geoffroy-Dechaume (1816-1892), sculpteur romantique »

Grace à la donation récente de la famille Geoffroy-Dechaume, la cité de l’architecture et du patrimoine s’est vue dotée de près de 4700 pièces issues du fonds d’atelier de ce sculpteur intiment lié à l’histoire du musée des Monuments français, dont il fut l’un des premiers directeurs.

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Moulages en cours d’installation.

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Vues parisiennes de Jacques Beurdeley

Vues parisiennes de Jacques Beurdeley

La marie du 8e arrondissement accueille pour une courte durée – du 2 au 12 avril – une exposition réunissant une centaine d’oeuvres de l’aquafortiste Jacques Beurdeley (1874-1954).

Beurdeley détail

Destiné à une carrière juridique par son père, Jacques Beurdeley abandonne rapidement ses études de Droit pour fréquenter l’atelier de Cormon à l’Ecole des Beaux-Arts. Sa rencontre avec Auguste Delâtre, l’imprimeur des peintres-graveurs, qui compte parmi les principaux acteurs du renouveau de l’eau-forte qui s’opère en France dans la seconde moitié du XIXe siècle va être déterminante dans sa destinée artistique. Initié aux techniques de l’estampe par Delâtre, Beurdeley adopte la pointe sèche et l’eau-forte comme principaux moyens d’expression.
Marqué par les modèles de Buhot, Meryon et Whistler, Jacques Beurdeley réalise de nombreuses vues de ville – Paris, Londres, Venise, mais également Amsterdam et Bruges. Après la Première Guerre mondiale, alors qu’il séjourne fréquemment et longuement à Provins, la campagne briarde devient son motif de prédilection.

Jacques Beurdeley, démolition rue Lepic, 1903, photo famille de l'artiste.
Jacques Beurdeley, démolition rue Lepic, 1903, photo famille de l’artiste.

L’exposition actuellement présentée à la mairie du 8e arrondissement se concentre sur les vues parisiennes de l’artiste: on y admire des estampes figurant Paris au tournant du XXe siècle, ainsi que de très nombreuses études, aquarelles et dessins préparatoires, pour la plupart inédits.
Dans ces estampes, l’empreinte esthétique de l’imprimeur Delâtre est prégnante: les tirages sont retroussés, les noirs intenses et veloutés. Comme Meryon ou Martial, Beurdeley a aimé représenter le « Paris qui s’en va » offrant de belles vues pittoresques de la capitale alors en pleine transformation.

Exposition entrée libre à la mairie du 8ème du 2 au 12 avril 2013.
Du lundi au vendredi de 12h à 18h. Jusqu’à 19h le jeudi. Samedi de 9h à 12h.

Pour en savoir plus: site de la famille de l’artiste   

Chagall, entre guerre et paix

Chagall, entre guerre et paix

Alors que le Musée national Marc Chagall célèbre ses quarante ans, le public parisien va pouvoir admirer à Paris, au musée du Luxembourg, 105 œuvres du peintre d’origine russe. Compte-rendu d’une visite en avant-première.

Homme-coq au-dessus de Vitebsk, 1925collection privée
Homme-coq au-dessus de Vitebsk, 1925, collection privée

L’exposition du Musée du Luxembourg n’est pas une rétrospective. Intitulée « Chagall, entre guerre et paix », elle propose une approche thématique de l’œuvre du peintre entre 1914 et 1960.

Marc Chagall peignant
Marc Chagall peignant

« Entre guerre et paix » : les commissaires ont imaginé un parcours en quatre temps, illustrant les exils successifs de Chagall dans une Europe en proie à deux guerres mondiales et une révolution. Avec, en fil rouge, l’idée que dans l’œuvre de Chagall peut « se lire son expérience intime de l’histoire ». En effet, si Chagall traite rarement directement des évènements qui lui sont contemporains, ceux-ci pénètrent toute son œuvre, extrêmement autobiographique.

On pourra reprocher à cette exposition dont le succès est assuré d’avance, un parcours peu audacieux, voire même franchement déjà vu. En effet, les thèmes de la guerre et de la paix mais plus encore celui de l’exil et du voyage ont déjà exploité à de multiples reprises dans les expositions consacrées à l’artiste (et notamment en 2003 au Grand Palais avec Chagall connu et inconnu). Si elle est peu audacieuse, cette approche thématique à l’avantage d’inclure une grande partie des créations de Chagall de la période 1914-1950.

Le parcours s’ouvre avec un auto-portrait. Nous sommes en 1914, Chagall vient de séjourner trois ans à Paris, au cœur du Montparnasse, fréquentant la fine fleur des avants-gardes. Il rejoint la Russie pour épouser l’élue de son cœur, Bella, restée à Vitebsk, leur ville natale. Parti seulement pour quelques mois, mais surpris par la guerre, le séjour en Russie durera huit ans. Huit ans pendant lesquels Chagall occupe cet exil forcé sur sa terre natale en peignant des tableaux empreints de la vie quotidienne de cette petite ville de garnison et de culture judaïque… Il y crée également une école d’art, dont il perdra la direction suite à un « putsch » des suprématistes, un temps appuyé par le tout jeune pouvoir communiste.

Au dessus de Vitebsk, 1915-1920New York, the Museum of Modern Art
Au dessus de Vitebsk, 1915-1920, New York, the Museum of Modern Art

La tension avec Malevitch et les menaces croissantes que la révolution soviétique fait peser sur le peuple juif l’amènent à regagner Paris avec femme et enfant. Un départ non sans douleur car teinté du sentiment d’être rejeté en son propre pays.

Les années d’entre-deux-guerres à Paris sont marquée par le développement de sa pratique de l’estampe, encouragé par le marchand d’art et éditeur Vollard. Ce dernier lui confie l’illustration de plusieurs ouvrages : Les âmes mortes de Gogol, les Fables de la Fontaine et la Bible. Ce sont des gouaches et des estampes de cette dernière entreprise, déjà connue du public parisien (Chagall et la bible, Musée d’art et d’histoire du Judaïsme, 2011), qui illustrent cette section de l’exposition, où l’on admirera en outre le très célèbre tableau « Le rêve ».

La Guerre, 1943Paris, Centre Georges Pompidou
La Guerre, 1943
Paris, Centre Georges Pompidou

Mais à nouveau, les menaces envers les juifs le rattrapent. En 1937, en Allemagne, les nazis saisissent dans les collections publiques ses œuvres et trois d’entre elles figurent à l’exposition « l’Art dégénéré » de Munich. Fin 1940, c’est de justesse et avec la complicité de l’ambassadeur des Etats-Unis que Chagall embarque pour New-York. Un exil qu’il n’a pas choisi. Il subit cette société de consommation à laquelle il n’adhère pas. Sa peinture, revient aux thèmes de l’enfance et Vitebsk réapparait encore et toujours dans ses œuvres. Mais dans les toiles de cette période, sa ville natale est en proie au feu et à la violence en écho à la situation des juifs en Europe, que Chagall n’ignore pas. Sa douleur est immense de savoir Vitebsk intégralement rasée après avoir été le théâtre de l’un des plus importants massacres perpétré par les escadrons de la mort. Dans les œuvres de Chagall transparait sa souffrance de voir ainsi son peuple persécuté. La crucifixion « juive » devient un motif récurrent dans ses compositions, symbole non pas, comme dans la tradition chrétienne de l’espoir de la résurrection, mais de la souffrance humaine.

La Danse, 1950-1952Paris, Centre Georges Pompidou
La Danse, 1950-1952
Paris, Centre Pompidou

En 1944, alors que l’issue de la guerre se profile, un nouveau malheur frappe Chagall : la perte de sa femme et muse Bella, qui succombe d’une maladie bénigne, mal traitée en raison de la pénurie de médicaments. Chagall, peintre pourtant jusqu’alors prolifique, cesse de créer pendant neuf mois. Quand il se remet à la peinture, la silhouette de Bella est toujours présente : elle ne le quittera jamais plus. Cinq ans plus tard, alors que Chagall regagne enfin la France, sa peinture renoue définitivement avec la paix, envahie de couleurs… C’est sur cette note joyeuse que s’achève le parcours de « Chagall, entre guerre et paix ».

Cent cinq œuvres ont été sélectionnées pour illustrer cinquante années cruciales de la carrière d’un artiste mort presque centenaire. On admirera au Luxembourg de très belles peintures, dont beaucoup sont issues des collections publiques françaises (1/3 des œuvres sont des prêts du Centre Pompidou).

Voulant traduire physiquement l’idée d’errance, l’agence N.C., qui signe la scénographie de l’exposition, propose un itinéraire en lacets. Le parcours, étroit et tortueux, fait de courbes et de recoins, semble ignorer la réalité des flux de visiteurs : quelle mauvaise idée pour une exposition qui promet d’attirer les foules ! Il y a fort à parier que la visite sera insupportable : ne parlons même pas de la circulation des groupes, tout bonnement impossible ! En revanche, on peut souligner le sage choix des coloris des cimaises : une palette de gris et un éclairage maîtrisé qui mettent parfaitement en valeur les œuvres.

CaptureUn grand merci à la RMN et à Carpewebem grâce à qui j’ai pu visiter cette exposition dans d’excellentes conditions lors d’une soirée spéciale web.

Toutes les infos pratiques sur Chagall entre guerre et paix sur le site du musée du Luxembourg.

A voir également : Marc Chagall, d’une guerre l’autre, au musée national Marc Chagall à Nice, jusqu’au 20 mai 2013.

Félix Thiollier au Musée d’Orsay

Félix Thiollier au Musée d’Orsay

Il vous reste un peu plus d’une semaine pour découvrir les magnifiques photographies de Félix Thiollier au musée d’Orsay. Un de mes coups de cœur parmi les expositions de l’hiver 2012-2013 pour le travail de ce photographe amateur qui n’avait presque jamais été exposé dans les institutions parisiennes. Invitation pour un voyage en noir et blanc d’une extrême beauté dans la campagne forézienne et auprès des usines stéphanoises du début du XXe siècle… Deux paysages à jamais disparus.

Félix Thiollier, Usines au bord de l’Ondaine, 1895-1910, Centre Pompidou
Félix Thiollier, Usines au bord de l’Ondaine, 1895-1910, Centre Pompidou

Félix Thiollier, un nom oublié de l’histoire de la photographie

L’œuvre de Félix Thiollier est celle d’un photographe amateur, qui, malgré 50 ans de pratique, ne s’est jamais intégré aux milieux photographiques parisiens. Photographe amateur et érudit local féru d’art et d’archéologie, Félix Thiollier décide, à 35 ans, d’abandonner la rubanerie familiale pour se consacrer à ses deux passions. L’exposition du musée d’Orsay met précisément en avant ces deux facettes de son activité dès lors : celle d’un défenseur du patrimoine forézien, tant bâti que paysager et celle d’un artiste photographe.

Félix Thiollier, Figure contemplant monts du Mézenc, Collection Julien-Laferrière
Félix Thiollier, Figure contemplant monts du Mézenc, Collection Julien-Laferrière

En défenseur du patrimoine régional, il publie en 1889 un ouvrage intitulé « le Forez pittoresque et monumental » qu’il illustre de ses propres clichés. La campagne forézienne figure parmi les premiers motifs qu’il saisit. Face à ces paysages dont il pressent la disparition prochaine, Félix Thiollier adopte une esthétique proche de celle des artistes de Barbizon dont il collectionne par ailleurs les œuvres. Proche de Auguste Ravier, un peintre local, Thiollier n’hésitera pas à poser son matériel au côté du chevalet de son ami, lui-même également photographe : leurs œuvres entretiennent d’évidents liens. La première partie de l’exposition est consacrée à ces photographies champêtres dont on admire la poésie. Dès ses débuts de photographes, Thiollier porte une attention particulière aux reflets sur les plans d’eaux et aux beaux effets atmosphériques, conférant à ses clichés une grandeur théâtrale.

Félix Thiollier, Etang à Mornand, Forez (Loire), Musée d'Orsay/photoRMN
Félix Thiollier, Etang à Mornand, Forez (Loire), Musée d’Orsay/photoRMN

Son intérêt pour les paysages champêtres de sa région natale l’amène à fréquenter les paysans dont il réalise de très émouvants portraits. Une dizaine sont exposés à Orsay. Loin des codes photographiques du portrait de l’époque, ses clichés surprennent par la proximité des modèles et marquent le visiteur par leur sensibilité et leur justesse.

Fumée des usines stéphanoises

La seconde partie de l’exposition présente une autre facette de l’œuvre de Thiollier photographe : ses vues industrielles stéphanoises. A la fin de sa vie, en effet, Félix Thiollier se passionne pour le paysage industriel de Saint-Etienne. Ses clichés sont un étonnant témoignage d’un bâti dont les ruines qui subsistent sont aujourd’hui élevées au rang de patrimoine.

Thiollier, Décor de fête ou de foire, Saint-Etienne(?), 1890 et 1910, Paris, musée d'Orsay/photoRMN
Thiollier, Décor de fête ou de foire, Saint-Etienne(?), 1890 et 1910, Musée d’Orsay/photoRMN

Image saisissante qui ouvre cette seconde partie d’exposition : un décor de théâtre usé, peuplé d’exotiques figures d’Asie et d’Amérique, de femmes au port de princesse, d’anges… Nous sommes sur un champ de foire. Dans l’ouverture de la toile relevée, une vieille femme courbée… et l’envers du décor ; une cour, les vestiges de quelques bâtisses abattues, un cabanon, le sol boueux, une échelle, des hommes, des poutres amassées. Plongée auprès des ouvriers des mines et aciéries stéphanoises.

Thiollier, La cokerie Verpilleux, environs de Saint-Etienne, Musée d'Orsay/photo RMN
Thiollier, La cokerie Verpilleux, environs de Saint-Etienne, Musée d’Orsay/photo RMN

Au visiteur contemporain, ces paysages charbonneux semblent irréels, magnifiés par d’extraordinaires effets atmosphériques saisis par Félix Thiollier. Du paysage champêtre aux paysages industriels, on retrouve ainsi le même goût des cadrages pittoresques, le même intérêt pour les belles lumières. Tas de crassier fumants, enfants parmi la ferraille, mineur poussant un tombereau, à Saint-Etienne, Félix Thiollier concentre son regard sur l’architecture des usines, les décharges, baignées d’une fumée vaporeuse, dans laquelle se détachent quelques silhouettes d’ouvriers, achevant de composer ces nouveaux paysages pittoresques.

Thiollier, Grappilleurs au sommet d'un crassier, Saint-Etienne, Musée d'Orsay/photo RMN
Thiollier, Grappilleurs au sommet d’un crassier, Saint-Etienne, Musée d’Orsay/photo RMN

Il faut venir ici avec une loupe pour véritablement voir. Voir la moue boudeuse de cet enfant à la casquette, l’expression goguenarde de cet adolescent, le sourire que l’on devine édenté de cet autre… Curieux amassés autour de l’appareil du photographe, grappilleurs indifférents à la présence du bourgeois amateur, il faut regarder ces visages…

Félix THIOLLIER, Mineurs à Saint-Etienne, vers 1900, musée Art moderne Saint Etienne
Félix THIOLLIER, Mineurs à Saint-Etienne, vers 1900, musée Art moderne Saint Etienne

Retrouvez toutes les informations sur cette exposition sur le site officiel du Musée d’Orsay

Architectures de papier

S’il ne s’agit pas vraiment d’une « exposition », la toute petite présentation « architectures de papier » vaut cependant pleinement une visite à la Cité de l’architecture !

Dans une unique salle au bout de la galerie Darlu, une quarantaine d’œuvres de papier, réalisées par 5 designers spécialisés dans ce matériau, offrent un voyage dans des mondes imaginaires et enchanteurs…

Peter Callesen, The Short Distance Between Time and Shadow, 2012, architecture de Papier
Peter Callesen, The Short Distance Between Time and Shadow, 2012.

Chacun des designers a exploré une technique particulière de découpage et d’assemblage. Peter Callesen utilise des feuilles A4, qu’il découpe patiemment, à la manière des maquettes en papier pour enfants : de la feuille émerge une forme sculptée. Si la partie évidée semble être l’ombre de la construction, les apparences sont parfois trompeuses… Ainsi ses plus poétiques créations de l’exposition sont celles où justement, l’ombre et le bâtiment ne correspondent pas. Par exemple, l’une des oeuvres figure une ruine et tandis que son « négatif » dessine d’un bâtiment encore intègre.

Béatrice Coron, s’inspirant des techniques de papier découpé et des théâtres d’ombres, crée de féériques univers foisonnant de mille détails, qui séduiront sans aucun doute les fans de Michel Ocelot et de Vallotton.

Béatrice Coron
Béatrice Coron

Ingrid Siliakus, quant à elle, a créé des maquettes de vides et de pleins à partir de feuilles simplement pliées à angle droit et patiemment découpées.

Ingrid Siliakus, Cité Chaillot, 2012.
Ingrid Siliakus, Cité Chaillot, 2012.

Mathilde Nivet propose les œuvres les plus colorées de l’exposition : de drôles d’amas urbains, réalisés à partir de photos d’architectures.

Enfin, Stéphanie Beck a réalisé de grandes maquettes de villes en trois dimensions, toujours à partir de papier blanc…

Mathilde Nivet
Mathilde Nivet

Au sortir de l’exposition, il faut absolument consulter les sites web de ces 5 artistes, car la présentation de la Cité de l’architecture n’est qu’une invitation à la découverte de leurs créations…

Au final, on regrette que les ateliers accompagnant l’exposition soient réservés aux enfants ! Heureusement, une petite bibliothèque, à disposition du public, offre la possibilité de piocher de bonnes idées de travaux manuels dans l’esprit de l’exposition pour occuper les dimanches pluvieux des petits… et des grands !

Info pratiques sur la page de l’exposition. Jusqu’au 17 mars! 

Kristin McKirdy: 4 ans de résidence à la Cité de la Céramique

Kristin McKirdy: 4 ans de résidence à la Cité de la Céramique

Jusqu’au 14 janvier, la cité de la Céramique à Sèvres proposait aux visiteurs de découvrir l’œuvre d’une céramiste contemporaine, Kristin McKirdy, qui vient d’achever une résidence de 4 ans dans l’institution. Compte-rendu d’une visite aux cotés de l’artiste, dans le cadre d’une sortie du groupe SMV.

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Kristin McKirdy, une figure majeure des arts décoratifs

Américaine née au Canada, la céramiste Kristin McKirdy a choisi de s’installer en France il y a vingt ans. Elle est aujourd’hui l’une des plus grandes créatrices de la scène des arts décoratifs français. Son travail a été primé en 2009 par le Prix de l’Intelligence de la Main, décerné par la Fondation Bettencourt Schueller.

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L’exposition de la Cité de la Céramique est articulée en deux parties : au rez-de-chaussée, dans l’espace des expositions temporaires, sont présentées une cinquantaine de pièces illustrant le travail de l’artiste durant ces vingt dernières années. A l’étage, mêlées aux collections permanentes, les quinze pièces exposées sont le résultat de la résidence de Kristin McKirdy à Sèvres, entre 2008 et 2012.

Vingt ans de création : des œuvres qui parlent aux sens

Bien qu’il ambitionne de résumer vingt ans de création, le parcours de la première partie de l’exposition ne se veut pas chronologique mais sensible. Dans une scénographie épurée et aérienne, toute la place est laissée à l’esthétique des œuvres.

P1310131Les pièces les plus anciennes de l’exposition datent de la période où Kristin McKirdy travaillait le grès. Il s’agit de deux vases fuseaux à l’épiderme bleu, d’une sensualité extrême.

Quand elle découvre la faïence, un matériau imposant moins de contraintes techniques et permettant une mise en œuvre plus sculpturale, son vocabulaire change. Les créations de Kristin McKirdy évoluent alors vers des formes plus rondes, organiques, sensuelles.

Pendant plusieurs années, le travail de création de l’artiste s’est organisé par cycle. Le rapport de l’homme à son environnement, la maternité, la destruction sont au nombre des thèmes qui ont guidés son travail. Si aujourd’hui l’artiste ne procède plus ainsi, ses œuvres restent toujours liées à ces questions à ces thématiques.

Bien que ces thèmes soient au cœur même du processus de création, l’artiste refuse de les imposer aux spectateurs. Souhaitant que ces œuvres entrent librement « en dialogue avec l’imaginaire du spectateur, son bagage, sa propre expérience », elle a demandé à ce qu’il n’y ait aucun cartel apposé dans les salles. Et cela ne pose aucun problème : les œuvres se suffisent à elles-mêmes. Elles sont même tellement fascinantes et si bien exposées que l’on ne cherche même pas ces titres absents. Et pourquoi une explication fixe alors que pour l’artiste ses œuvres sont tout à la fois « un paysage, un corps humain, un couple… et une sculpture, tout simplement » ?

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Les œuvres de Kristin McKirdy sont caractérisées par un vocabulaire formel composé de volumes arrondies, sphériques, sensuelles. L’artiste aime jouer sur l’opposition entre la surface et l’intérieur, sur l’apparente perfection du volume (car jamais ses sphères ne sont tout à fait régulières). Outre le volume, l’artiste porte un intérêt marqué au travail de l’épiderme de ses œuvres, affectionnant les effets de surfaces contrastés : s’opposent l’aspect lisse et brillant de l’émail et la surface rugueuse et mate de la terre travaillée. Le même goût du contraste se retrouve dans les coloris : aplats intenses vifs et primaires affrontent des épidermes blancs ou gris et mouchetés.

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S’offrant à la vue, les œuvres de McKirdy procurent une immense sensation d’apaisement. Mais rapidement, l’envie de toucher, de caresser les surfaces et les formes devient irrésistible. On voudrait effleurer l’émail brillant, lisse et froid, soupeser la sphère, tâter son irrégularité à peine perceptible. P1310128Les œuvres semblent presque posséder un pouvoir d’attraction. Il apparaît vite que seul au toucher elles pourraient complètement se révéler. Une tension et une tentation manifeste dont l’artiste a pleinement conscience et sur laquelle elle avoue jouer dans cette exposition. Car certaines de ses œuvres sont originellement conçues comme manipulable. Ainsi, telle sculpture évoque un jeu d’adresse. Les sphères sont amovibles et dissimulent des trous. Plus loin, pour démontrer un propos, elle se saisit d’un des membres d’une œuvre intitulé Famille. Et le public fond d’envie de pouvoir faire de même.

Quatre ans de résidence à la manufacture de Sèvres

A l’étage, la présentation du travail de Kristin McKirdy se poursuit dans le parcours d’exposition des collections permanentes avec quinze œuvres réalisées durant la résidence de l’artiste à Sèvres entre 2008 et 2012. Le choix scénographique de confronter des pièces contemporaines et des porcelaines du XVIIIème siècle prolonge le dialogue avec l’histoire des ateliers de Sèvres, que l’artiste a engagé pendant ses quatre ans de résidence. Du fait de sa formation première en histoire de l’art, Kristin McKirdy ne pouvait rester indifférente face au riche passé historique de la manufacture et aux extraordinaires collections et archives que son musée conserve. Cet intérêt s’est matérialisé par différents biais, tant sur le plan technique que formel.

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Lors de sa résidence, Kristin McKirdy a expérimenté pour la première fois la technique de la porcelaine, fleuron du savoir-faire de la manufacture de Sèvres. Explorant les archives de l’institution, l’artiste, aidée des artisans, a par ailleurs cherché à retrouver certains secrets d’émaux particulièrement précieux. Enfin, au terme de ce dialogue Kristin McKirdy s’est confrontée à la question du décor et de l’ornement, qu’elle avait jusque là occulté de son travail. Explorant le répertoire ornemental du XVIIIème, elle a produit Famille et Bones.

Bones, 2012

Ces quinze pièces, qui clôturent l’exposition, invitent la poursuite de la visite dans les collections historiques du musée, témoignent de la richesse des approches de Kristin McKirdy face à l’histoire de la manufacture. Pari réussi pour la Cité de la Céramique, donc, qui avait invité l’artiste afin qu’elle « explore le répertoire de Sèvres et en propose une relecture contemporaine »

Mes sincères remerciements à l’équipe de la Cité de la Céramique, qui a offert au groupe SMV une excellente soirée et à l’artiste pour nous avoir donné, avec une simplicité et gentillesse, des clés pour comprendre son travail. 

L’univers de Michel Tremblay – Québec

L’univers de Michel Tremblay – Québec

Si vous êtes de passage à Québec, ne manquez surtout pas l’exposition Michel Tremblay qui se déroule actuellement au Musée de la Civilisation. En plus de vous faire vivre la déroutante mais néanmoins très plaisante expérience d’une exposition sans objet, elle constitue un excellent moyen de (re) découvrir l’oeuvre d’un des écrivains québécois majeur de la seconde moitié du XXe siècle. 

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« Poème de cristal. De Gallé à Lalique, les verreries Art Nouveau du Petit Palais »

« Poème de cristal. De Gallé à Lalique, les verreries Art Nouveau du Petit Palais »

Jusqu’en septembre, le Petit Palais (Paris) propose un accrochage exceptionnel de verreries art nouveau conservées dans ses collections. Intitulé « Poème de cristal. De Gallé à Lalique, les verreries Art Nouveau du Petit Palais », l’accrochage rassemble une trentaine de pièces signées des plus grands noms : Gallé, Lalique, Brocard, Daum frères, Décorchemont…

Emile Gallé, Corps de lampe, vers 1900, cristal soufflé à plusieurs couches, marqueterie de verres, bronze patiné, Paris, Petit Palais
Emile Gallé, Corps de lampe, vers 1900, cristal soufflé à plusieurs couches, marqueterie de verres, bronze patiné, Paris, Petit Palais

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